ACTUS FCBTP

Interview de Silvio Pontoni, président de la FCBTP pour le 100% BTP : « Rester unis et soudés dans cette situation inédite »

Silvio Pontoni, comment abordez-vous cette crise sanitaire ?

Avec le ralentissement d’activité du BTP depuis plusieurs années, les échéances électorales de 2018, 2019 et en septembre, qui n’arrangent rien à la situation, je dois avouer que cette crise du Covid-19 est un énorme coup de massue au moment où notre secteur était déjà affaibli. J’ignore comment nos entreprises vont pouvoir s’en sortir. Evidemment, nous ne sommes pas le seul secteur touché de plein fouet, le tourisme, le commerce ou l’industrie le sont également, mais hors de question de baisser les bras !

D’une part, il s’agit de rester force de proposition, de parler et de représenter d’une seule voix, d’autre part, de pouvoir apporter des réponses concrètes aux situations vécues au quotidien par nos chefs d’entreprise. Il peut nous être reproché de ne pas assez médiatiser nos actions durant cette crise. Cependant, je peux vous garantir que la FCBTP travaille sans relâche depuis des semaines pour informer et accompagner les adhérents. En parallèle, nous sommes associés à la plateforme qui réunit les organisations patronales, syndicales, les chambres consulaires et les clusters. Par ailleurs, notre affiliation à la la Fédération française du bâtiment, nous permet de bénéficier d’un accompagnement hors pair avec des préconisations concrètes que nous mettons d’ailleurs en pratique pour en faire bénéficier nos adhérents. Aussi, j’encourage tous nos adhérents et bien sûr le secteur au sens large à rester unis et soudés dans cette situation inédite, de nous faire confiance. C’est une nécessité vitale aujourd’hui !

Quelles ont été les actions de la FCBTP ?

Bien avant l’annonce des mesures de confinement, le 21 mars, le bureau FCBTP s’est organisé en bureau de crise et nous assistons à toutes les réunions avec le gouvernement. Nous avons de suite souligné deux incohérences : d’un côté, on a demandé aux Calédoniens de rester chez eux, aux employeurs de mettre en place le télétravail dans la mesure du possible, de l’autre, aucune directive n’a été formulée concernant notre secteur. Il était même demandé à nos salariés de continuer à se rendre sur les chantiers alors que les conditions de protection étaient impossibles à tenir par manque de matériel. Et enfin, certains chantiers ont été immédiatement inaccessibles, en raison de blocages notamment. Un sondage a été lancé auprès de nos adhérents dès l’annonce du confinement et les résultats se sont révélés catastrophiques : 30 à 70 % des salariés ont déserté leur poste sous l’effet légitime d’être contaminés dans un contexte où différents corps de métier peuvent se côtoyer.

Les questionnements ont été nombreux (et le sont toujours) tant au niveau de l’organisation, du versement des salaires que de l’accompagnement des entreprises. Dès le début, la FCBTP a demandé aux maîtres d’ouvrage de revoir la planification des travaux sans appliquer de pénalités de retard et de verser les paiements aux entreprises en temps et en heure. Une action utile aux adhérents et un effort de solidarité accepté dans l’ensemble que je tenais d’ailleurs à saluer. Sur notre site internet et notre page Facebook, une page spéciale Covid-19 a été créée pour relayer auprès de nos adhérents toutes les avancées, les informations pratiques, institutionnelles, etc. La communication de proximité est l’un de nos chevaux de bataille pour rester en contact avec nos adhérents. C’est très important, notamment en tant de crise.

Le chômage partiel Covid-19 a été acté et la Nouvelle-Calédonie bénéficie du plan national de soutien. Qu’en pensez-vous ?

Oui, c’est une nouvelle rassurante qui n’était de loin pas gagnée notamment concernant notre secteur. Dès le début de la crise, la FCBTP a défendu, entre autres mesures, la mise en place du chômage partiel. Cette allocation « Covid-19 » concerne donc toutes les entreprises, dont celles du BTP, et l’accès pour en bénéficier a été simplifié, selon des conditions plus équitables et réalistes, autre aspect que nous avions soulevé. Par ailleurs, nous avions demandé que les critères d’éligibilité au plan national de soutien soient allégés. Nous avons été entendus et, à l’instar des organisations patronales et syndicales, nous ne pouvons que féliciter nos instances. C’est un premier ouf de soulagement.

Le déconfinement progressif a commencé. Comment se passe cette reprise ?

D’abord, je voudrais dire qu’avec 18 cas recensés sans cas autochtone depuis mi-mars, on ne peut pas parler d’épidémie en Nouvelle-Calédonie. La gestion pour éviter une propagation du Covid-19 est très bien menée, il faut le reconnaître. Cependant, le risque zéro n’existant pas, il est nécessaire de rester extrêmement vigilant, sans sombrer dans la psychose collective, ce qui est parfois difficile. Je reconnais que cette situation reste quelque peu anxiogène, mais il faut essayer de surmonter cette sensation. L’activité doit reprendre et, vu le contexte mondial, la Nouvelle-Calédonie, même soutenue par l’Etat, ne peut pas se permettre d’être sous perfusion.

Pour l’heure, difficile de mesurer les répercussions dans notre secteur. Il y aura très certainement de la casse, je le déplore, dans les semaines, mois à venir. On essaie d’anticiper le mieux possible. Ainsi, pour assurer la sécurité de nos salariés durant cette reprise d’activité, la FCBTP, en partenariat avec Intermed, a déjà distribué 27 500 masques au total auprès d’une quarantaine d’entreprises. Cette opération sera d’ailleurs renouvelée d’ici fin avril. Côté lotion hydroalcoolique, une centaine de flacons de 50 ml, fabriqués par la distillerie Moonshine du Caillou, à Dumbéa, ont été remis à une trentaine d’adhérents. La fourniture de bidons de 5 litres de lotion hydroalcoolique est à l’étude.

Avant de conclure, j’aimerais souligner que le plan de relance économique défini avant cette crise suite au Grand Débat ne doit pas être renvoyé aux calendes grecques. Nous allons continuer à défendre les intérêts de nos entreprises, qui, et je le rappellerai à nos dirigeants, forment le deuxième pan de l’activité économique de notre pays.